Ma réflexion me ramène déjà en mémoire certains moments en noir et blanc et d’autres en couleur de mon passé. Bien assis devant mon minuscule écran, je m’enthousiasme de voir tous ces gens de mon entourage qui commencent à défiler dans ma mémoire. Je les reconnais, je les sens, et à la limite, je peux presque les toucher. Je réussis même à entendre le murmure de la rue derrière. Je renifle les odeurs qui s’échappent des commerces environnants. À quand le retour à l’extérieur des étals et des comptoirs des producteurs pour que le centre-ville redevienne un pôle d’attraction socio-économique et un attrait touristique de première ligne ? Je me surprends à sourire d’un passé si proche, alors qu’il est si loin en réalité. Peut-être suis-je trop émotif dans ma volonté de reconstitution du passé, mais je me dis que ça pourrait tout aussi bien se passer aujourd’hui tellement ma mémoire de certains moments est vive. J’ouvre ici une parenthèse nostalgique sur une période de ma vie qui m’a marqué, soit la période qui va de la fin des années 40 (l’après Deuxième Guerre mondiale), jusqu’au début des années 80 (premier référendum sur l’avenir du Québec), en m’attardant sur les années 40 à 60, que j’appellerai : les joyeuses et les glorieuses. Celles de mon adolescence, qui fut ma période préférée. En même temps que je vivais dans le présent, je me projetais vers l’avenir avec excitation et curiosité. Il flottait alors dans l’air une ambiance détendue et relâchée. Nous étions simplement heureux, satisfaits, dans un confort modeste et sobre pour la plupart d’entre nous. Notre vie quotidienne s’alimentait de « petits bonheurs » passagers et éphémères, mais combien agréables. Il nous suffisait de les apprécier, puisque demain serait un autre jour. Nous traversions une époque d’effervescence, de changement et de progrès. Ce climat social apaisant nous invitait à la créativité, à l’aventure et au dépassement. Il nous était permis de croire en tout, et surtout en nous. À vous de faire parler votre rétroviseur et vos souvenirs personnels. N’attendez plus pour prendre place dans votre auto. Entreprenez-le ce voyage de retour dans votre passé. Vous êtes votre opérateur en chef. À vous de jouer. Si vous saviez ce que vous pourriez découvrir de passionnant ! Jean Rajotte C’est un bel exercice que vous nous suggérez là. Dans le même esprit de ce que je propose dans mon Carnet d’un voyage intérieur, paru l’automne dernier, vous nous donnez l’occasion, à partir d’un lieu où nous nous sommes tous retrouvés certains jours de notre vie, à mettre en branle nos souvenirs de ce qui s’y est passé et à noter l’incidence que cela a eue sur nos vies.